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Marc Villemain
10 novembre 2006

Douleur visionnaire

KafkaFragments du Journal de Kafka, que j'avais naguère recopiés tels quel.

Nous sommes en 1911, Kafka a vingt-huit ans. Il est persuadé qu'il n'atteindra pas la quarantaine - et ne se sera trompé que d'un an. Il ressent une tension dans la partie gauche de son crâne. Voici ce qu'il en dit : "Cela me donne la sensation d'une dissection presque indolore pratiquée sur le corps vivant où le scalpel, qui apporte un peu de fraîcheur, s'arrête souvent et repart ou reste parfois tranquillement posé à plat, continue à disséquer prudemment des membranes minces comme des feuilles, tout près des parties cervicales en plein travail".

Plus loin encore, cette vision qui m'a très longtemps poursuivi, qui parfois a nourri mes rêves et, je crois, un peu de mon inspiration : "Sans cesse l'image d'un large couteau de charcutier qui, me prenant de côté, entre promptement en moi avec une régularité mécanique et détache de très minces tranches qui s'envolent, en s'enroulant presque sur elles-mêmes tant le travail est rapide".

Commentaires
P
J’avais l’âge de 12 ans, et cela faisait la deuxième fois en 6 ans que les enfants de l’école détruisaient mon deuxième tableau au beau milieu de la cour d’école, comme on immolait les œuvres sataniques au Moyen Age. Et j’étais à nouveau projeté à terre violemment et roué de coup de pieds et de coups de poings pour l’unique raison qu’on acceptait pas que je sois autant en avance sur mon âge dans le domaine des arts.<br /> Puis le tumulte cessait toujours, comme si l’orage disparaissait, et je restais seul hébété devant ce qui restait de ma petite œuvre, c’est à dire cette fois-ci des morceaux épars flottant dans une grand flaque d’eau.<br /> Je n’avais même pas le force de pleurer, et je restais de longues minutes hébété sans pouvoir penser à quoi que ce soit.<br /> Puisque les mêmes enfants de l’école me torturaient depuis bientôt un an et que c’était la fin de l’année scolaire, j’avais décidé de me suicider, et de quitter ce monde absurde et dépourvu de sens.<br /> Puis je m’étais ressaisi un instant et dans un réflexe de survie, je m’étais précipité dans la cave où j’allumais une petite lumière qui faisait jouer les ombres de la pièce de façon lugubre, et je me mettais à compulser les vieux livres qui étaient alignés dans une grande armoire métallique, me disant que pour une fois, j’aurai peut-être la chance cette fois de trouver mon salut chez un écrivain, moi qui aimait tant écrire et à qui on avait fait rentrer son art dans sa gorge.<br /> Et je découvrais un titre « La Métamorphose »,où il était question du changement d’un être humain qui n’arrivait pas à quitter sa chambre en quelque chose d’autre. Et c’est ce qui m’arrivait justement, je n’arrivais plus à sortir de ma chambre car j’étais terrorisé par la vie, par la ville, par l’Univers tout entier.<br /> Je remontais dans ma chambre et m’engouffrais alors dans la plus profonde énigme humaine qui soit : celle de la transformation.<br /> Deux mois après, j’étais frappé de plein fouet par une psychose bipolaire qui allait projeter ma vie dans un enfer terrestre, un enfer moderne : le monde de Kafka.
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R
oui sauf que je dois multipolaire, à force d'en user et d'en abuser)))
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M
J'ignore si vous êtes "facilement impressionnable". Peut-être votre ami bipolaire avait-il seulement raison en regardant le monde comme absurde...
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M
Si vous vous usez de plusieurs pseudonymes, alors vous êtes proche du syndrome Romain Gary / Emile Ajar, et c'est bon signe... Nous sommes des bipolaires !
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K
Je ne vais tout de même pas jusqu'à dire qu'il faille avoir de gros problèmes psychologiques (je préfère dire ça finalement, ignorant ce qu'est un fou) pour être lucide ou talentueux. Au mieux, je pense que ça peut se rejoindre. Peut-être simplement parce qu'ils se posent des questions qu'on laisse de côté ou qu'on ne voit pas habituellement. Comme toujours, j'en sais rien.
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