La Russie de Medvedev, poutinienne en diable, vient donc de donner une leçon de realpolitik à l'Occident. Leçon qui pourrait avoir tous les attributs du cas d'école :
- présence militaire au long cours et pression aux abords d'un territoire national perclus de mouvements séparatistes - la Géorgie ;
- riposte immédiate à une initiative militaire géorgienne dans ses territoires séparatistes ;
- cessez-le-feu (le plan Sarkozy-Medvedev) inespéré pour la Russie, puisque ne comprenant aucune mention à l'intégrité territoriale géorgienne ;
- mépris du cessez-le-feu et de l'accord, et installation plus ou moins provisoire de l'armée sur les territoires incriminés ;
- reconnaissance de l'indépendance abkhaze et ossétienne.
Tout cela en deux semaines. Les experts apprécieront le savoir-faire des Russes. Et subsidiairement de leur nouveau président, Dmitri Medvedev, dont le moins que l'on puisse dire est qu'il ne suit pas vraiment la voie qu'il avait tracée pour être élu, en mars dernier, avec plus de 70 % des suffrages. Il est vrai que Vladimir Poutine avait prévenu, quelques heures après l'élection : Medvedev « n'est pas moins russe nationaliste que moi, dans le bon sens du terme. C'est un patriote qui défendra les intérêts de la Russie sur le plan international. »
Nous avions souligné, dans un message précédent, la vacuité du plan concocté par Nicolas Sarkozy et co-rédigé par Dmitri Medvedev. L'échec du président français est donc total, comme le redoutaient de nombreux spécialistes. Pire : il n'est pas illégitime de penser que ce plan, muet sur l'intégrité du territoire géorgien, conjugué aux propos du président français sur le droit de la Russie à « défendre les intérêts des russophones », aura encouragé les Russes dans leur action, au bas mot les aura libérés de toute réserve.
Des commentateurs, mais aussi Medvedev lui-même (qui dit ne pas en « avoir peur »), évoquent un retour à la guerre froide. Ce ne sont là que des rodomontades, manière assez classique de montrer les muscles et de poursuivre sur le registre d'une provocation qui tétanise l'Occident. L'idée en effet me semble saugrenue, mais plus encore parfaitement irréaliste : la Russie de 2008 n'est pas l'Union Soviétique, elle n'en a aucun des moyens géopolitiques, économiques ou humains. Cela n'enlève rien à son ambition : retrouver une suprématie impériale dans sa géographie historique - cet introuvable « étranger proche. » Ambition très improbable, mais suffisamment ardente pour créer un climat d'insécurité militaire comme on n'en avait pas connu depuis longtemps. Ainsi les réactions des pays baltes, de la Pologne, et davantage encore de l'Ukraine, compréhensibles à maints égards, ne peuvent laisser d'inquiéter. Ne serait-ce que parce qu'un différent militaire entre la Russie et l'Ukraine aurait évidemment une tout autre portée qu'entre la Russie et la petite Géorgie.
Ce qui déroute enfin, et qui, en effet, nous ramène à des temps plus anciens, c'est le changement de ton de la Russie, cette impression qu'elle dit en substance ne plus vouloir se soucier désormais des déclarations et des menaces de l'Occident, cette nouvelle affirmation d'elle-même, non en tant que membre de la communauté internationale, mais en tant qu'acteur indépendant et auto-suffisant. Medvedev a sans doute en tête, à plus ou moins longue échéance, d'approfondir les politiques de coopération avec l'Europe et les États-Unis - du moins est-il trop tôt pour penser le contraire. Son pari consiste sans doute à geler la situation et à parier sur le temps, autrement dit à faire en sorte que la Russie ait, de facto, repris pied dans le Caucase, avant de reprendre la politique de conciliation et de coopération qu'il afficha avant son élection. C'est ce jeu dialectique-là, pour classique qu'il soit, qui me semble lourd de menaces.
Ce serait trop long sur commentaires ici.
En gros : Personne n'a fait gaffe à une déclaration de Poutine, en 2006, je crois, qui disait en substance : Les Etats Unis, gendarmes du monde, ça suffit. La prioritç de la Russie sera dçsormais, l'armée et le réarmement.
Je l'avais notée mais je je saurais la retrouver.
D'abord, la Russie et l'Occident, comme vous dites, ne parlent pas le même langage. La Russie n'est pas une démocratie. L'analyser dans ses déclarations d'intention revient à vouloir lire avec des lunettes de presbyte conçues pour un myope ( je ne dis pas ça pour vous, Marc.)
Surtout, la provocation vient des Américains et de leurs valets européens. Dites-moi, Marc, qu'est-ce que la Géorgie a à foutre dans un traité dit de l'Atlantique Nord ?
La Géorgie est en Asie, armée et conseillée par Israel...
Et puis, ici, en Pologne, les batteries de missiles, ou anti-missiles : Au Nord du pays,sur la Baltique, en ligne droite juste braquées sur le territoire russe (une enclave en-dessous des pays baltes)...On ne pouvait pas moins bien affichées les intentions. C'est sûr.Et un radar géant en Tchéquie...
La Russie ne veut pas se laisser encercler. En dépit du peu d'affection que j'ai pour les pouvoirs du Kremlin, la Russie réagit normalement.
Une base en Floride sous contrôle russe, ça donnerait quoi, Marc ? Qu'en diraient les démocraties donneuses de lecons ?
Et puis, Poutine avait prévenu : "Le Kosovo vous retombera sur la gueule."
L'Occident pris à son propre piège.
La Russie ne veut pas d'une suucursale de la CIA a sa porte. Normal.
Cette tentative d'encerclement par les provocateurs occidentaux ( qui n'ont jamais su décrypter le langage de la Russie) en cache une autre. A mon seul avis.
La frappe de l'Iran. Immobiliser la Russie pour qu'elle ne puisse réagir. La Russie est à la source du programme nucléaire iranien.
Le jeu des engrenages est lancé. De ces engrenages d'alliance qui font les grands cataclysmes.
La Russie s'en fout des gesticalions de Sarkozy et autres "Kouchenerades."
Militairement et stratégiquement, elle a déjà gagné. Et puis, savez-vous que Medvedev reçoit son homologue chinois et espère son soutien, quasiment acquis...Alors, les protestaions des démocraties....Elles ne font pas le poids.
les Russes sont des joueurs d'échecs. les coups sont longtemps prévus à l'avance et ils voient clair dans le jeu des autres....
Je ne suis pas optimiste, Marc.Ca ne sent pas bon.
Ca sent la poudre.