Ce que nous sommes
Nous sommes des solitudes qui, de temps en temps, acceptent qu'on les accompagne. Elles s'acculent à l'unisson.
La solitude
On aime la solitude pour autant qu'elle ne nous laisse pas seuls avec nous-mêmes, pour autant qu'on la laisse libre d'en fréquenter d'autres et d'être entendue, parfois reçue par elles. On l'aime quand elle est une manière, la meilleure pour nous, pour notre besoin d'espace et de distance, d'accompagner le cours du monde. Elle nous abat dans l'instant même où nous n'entrapercevons plus notre silhouette dans le lointain.
Condition de l'écrivain
Albert Camus à nouveau :
La noblesse du métier d'écrivain est dans la résistance à l'oppression, donc au consentement à la solitude.
Journal du 27 juillet 1994
Je continue de feuilleter ces vieux journaux intimes - avant, donc, de les jeter les uns après les autres.
Cette note.
Dans la nuit. Insomnie. J'écris. Il faut parvenir à habiter la solitude, l'habiter tout entière, dans sa totalité pleine ; se coller à ses parois. Imaginer une pièce carrée, vide, complètement vide et nue, sans autre matière que le vide et la pénombre - ou au contraire une clarté trop grande, trop lumineuse : elle est là, la solitude est là. Il faut s'y engouffrer, ne pas lui laisser, à elle, ce plaisir de nous engouffrer, elle ne demande que ça. Il ne faut pas se laisser habiter, mais l'habiter, elle. Et si possible avec joie.