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Marc Villemain
13 novembre 2024

Ostinato (un mot sur)


On dira peut-être que je suis de parti pris, plus gentiment que je manque d’objectivité (« La neutralité érigée en vertu morale ! », s’agace le père dans la pièce), au pire que je pèche par vanité. Comme il n’est rien de plus difficile (et pénible…) de chercher à convaincre quiconque de ne pas penser ce qu’il pense, ma foi, tant pis.

 

J’ai seulement envie de dire, après avoir assisté à une petite vingtaine de représentations d’« Ostinato », combien je me sens fier de cette pièce et combien elle peut être merveilleuse. Du moins je sais qu’elle l’est devenue. Je le sais, non parce que je l’aurais écrite (en vérité, je ne suis que médiocrement content de mon travail), mais parce que je vois les comédiens y déployer peu à peu tout ce qu’ils ont de désir, de plaisir à jouer, je vois leurs envies d’émotions, de sensations, de justesse, et parce que j’ai cette chance, ce tout petit plaisir de pouvoir observer le public et la tension qui s’imprime sur les visages, les regards et les corps. Car chaque fois, le public m’apparaît singulièrement concentré. Non que le public de théâtre le serait en soi ou par vertu, mais parce que les comédiens, adossés à une superbe mise en scène de l’épure, les conduisent à cette sorte de recueillement. Et lorsque le noir finit par se faire sur la scène, je me fais souvent la remarque que nul ne bouge, nul, même, n’ose applaudir, comme si l’auditoire cherchait à méditer son émotion, à prolonger cette latence, cette incertitude, et finalement à grapiller quelques instants de son soliloque intérieur, de ce silence qui converse en lui. Et je dois dire que ce moment est bien beau. Or rien de tout cela n’aurait été possible sans le travail exceptionnel qu’a réalisé Dimitri Rataud, metteur en scène et directeur d’acteurs brillant, exigeant et passionné, ni sans ce qu’Hélène Cohen, Ludovic Baude et Claude Aufaure jettent d’eux-mêmes chaque soir sur scène, cette sorte de conversation que, une heure et quart durant, ils semblent avoir entre eux. Pour tout cela, merci.

 

Au théâtre de la Huchette jusqu'au 7 décembre 2024
Mise en scène : Dimitri Rataud, assistée d'Emmanuelle Jauffret
Avec : Hélène Cohen (Mado), Ludovic Baude (le fils), Claude Aufaure (le père)

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