Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Marc Villemain
9 janvier 2007

Coma - Billet bref sur Pierre Guyotat

Pierre_Guyotat___Coma
S
ans doute en raison d'une certaine forme de paresse autant que par désir de ne pas me laisser influencer, j'ai souvent tendance à lire les livres avec un peu de décalage dans le temps. Ainsi de Coma, de Pierre Guyotat, auteur dont on sait qu'il occupe une place singulière dans le paysage littéraire, et qui jouit conséquemment d'autant de lecteurs inconditionnels que de détracteurs farouches.

Or je suis sans doute en train de passer à côté de ce texte. Je sens bien que cette écriture, dont Jacques Henric a raison de dire qu'elle "bouleverse la logique linéaire du temps", impose sa nécessité et incarne une vision toujours plus poétique du réel. Et j'envie parfois la qualité, crue mais toujours sensible, de ses visions. Reste que je passe à côté, que je trouve bancale
la narration de son moi, qu'elle m'apparaît parfois alambiquée, ou maladroite, parfois enflée ou surdimensionnée - mais peut-être m'est-elle simplement inaccessible. Surtout, surtout, je m'ennuie. Et je le dis avec d'autant plus de réticence que Coma est le récit écorché d'une existence à propos de laquelle on ne se sent guère autorisé à pérorer ou à émettre quelque jugement esthétique. Mais vous connaissez l'ennui, terrible, tyrannique, unilatéral, s'imposant sans l'ombre d'une nuance et vous étreignant malgré toutes vos préventions. Si bien que je rate ce livre car je le lis comme mû par le sens du devoir, et plus encore du respect dû à un texte qui s'acharne sur l'effarement et le traumatisme d'un être devant le monde : on ne peut lire avec quelque profondeur dans de telles dispositions.

Alors je note, ici ou là, certains effarements, certaines lucidités, certaines fulgurances, tous traits dont j'aurais aimé qu'ils fussent miens : "Voir le monde comme le voient en même temps la taupe - qui voit si peu -, l'araignée d'eau, l'aigle ; ressentir le monde comme le ressentent l'acarien du tapis, le crabe ou la baleine ; comme la mouette en plein froid posée sur la couronne de la statue du roi, qui s'y réchauffe en déféquant".

Commentaires
M
Merci pour ces aimables voeux, que je vous retourne bien sincèrement.<br /> Oui, "Coma" ne laisse sans doute pas indifférent - et c'est déjà beaucoup ; je reste pourtant sur ma faim, et l'effort dont vous parlez très justement a été plus intense que mon plaisir ou mon intérêt.<br /> Très heureux que vous ayez vous-même dévoré "Dévorations", grand livre d'un de nos plus grands écrivains.<br /> MV
Répondre
A
Votre billet est très beau, parce que très bien écrit, comme d'habitude, et surtout parce qu'il est sincère.<br /> <br /> J'ai fait, comme vous, effort pour lire ce livre. L'ayant lu, j'étais comme ce voyageur échevelé au sommet d'une montagne, et qui contemple les nuées: essouflé, heureux de l'effort accompli, pris, aussi, par cette poésie métaphysique qui saisit et qui emporte.<br /> <br /> Il est étrange que vous en parliez maintenant, puisque, comme en un jeu de miroir, j'ai lu le dernier livre de Richard Millet, Dévorations, que j'ai adoré, dévoré.<br /> <br /> IL fera l'objet de prochaines chroniques.<br /> <br /> Je vous présente tous mes voeux,<br /> <br /> Amicalement<br /> <br /> Augustin
Répondre