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Marc Villemain
21 mars 2007

Darfour : meeting à la Mutualité

L'engagement humanitaire est ce qui reste de l'idéologie quand la politique a failli - ou de la politique quand l'idéologie a failli ; ce qui ne signifie évidemment pas que "l'humanitaire" soit exempt de considérations politiques ou idéologiques, tant s'en faut. Cette antienne, qui n'est pas récente, est probablement assez juste, et formulée, c'est selon, avec bienveillance, résignation ou dénigrement. Pour ma part, je m'y rallie et m'y suis rallié de bonne grâce il y a assez longtemps déjà : il faut être rudement sûr de soi et de sa pensée, rudement sûr de la pertinence des clivages traditionnels, rudement sûr, encore, de la réalité du pouvoir dit politique, pour ne pas admettre les limites de l'engagement classique (généralement bipolaire). Nul ne pouvant raisonnablement suivre le rythme de la complexification exponentielle du monde, et le politique ne pouvant pas davantage échapper à cette règle, ne nous restent que quelques fondamentaux, dont il est certes facile de sourire mais dont on voit mal comment l'on pourrait leur dénier ce statut : à défaut de sauver le monde, donc, veiller à ce que le martyre des humains ne se perpétue pas dans le plus complet silence, dans le meilleur des cas contribuer à en sauver quelques-uns. Nous en étions là déjà au moment de la Bosnie et du Rwanda : la donne ne se pose pas en d'autres termes pour le Darfour.

Le citoyen lambda que je suis a depuis longtemps déserté les lieux et instances du militantisme pour, globalement, se replier. Je vote, je m'informe, je ne refuse pas la discussion, parfois je pétitionne, j'écris : voilà, peu ou prou, ce qu'il subsiste de mon passé militant, un vague sens du devoir. Sans doute nul ne peut déserter sans quelque accès de mauvaise conscience (et il est vrai que les militants sont assez doués pour lester de culpabilité les esprits moins engagés), mais on s'en arrange au fond assez bien. Restent donc "les grandes causes", et ce qui se produit au Darfour, génocide, crime contre l'humanité ou quelque autre appellation qu'on voudra bien lui donner, en est évidemment une. Que l'on me permette toutefois cette digression : le récent déni de génocide en Bosnie, officialisé dans un arrêt de la Cour de Justice Internationale, n'est pas pour rassurer quant à la capacité du droit à qualifier les crimes. A l'heure où la France est plus isolée que jamais du monde et de l'Europe, au moment aussi où seul semble la passionner son devenir hexagonal (comme s'il était indépendant du reste du monde), et alors que le temps électoral que nous traversons n'a sans doute que rarement connu une telle insignifiance, le meeting organisé par le collectif Urgence Darfour, SOS Darfur et Bernard-Henri Lévy aura au moins permis de faire entendre une autre ambition, et d'engager quelques-uns des candidats à l'élection présidentielle. C'est pourquoi j'y étais, pour faire masse, l'hystérie médiatique et la sottise communiquante n'étant sensibles qu'au bruit de la foule.

Commentaires
F
La mauvaise humeur peut naître de la déraison d'autrui ou du mauvais esprit du temps où l'on vit.<br /> "La guerre est beaucoup plus qu'agression et conquête, c'est une suspension des contrôles de " civilisation ", un déchaînement ubrique des forces de destruction. Et quand s'opposent , dans le jeu de la vie et de mort, non seulement des intérêts et des fureurs, mais aussi le sens de ce qui est sacré et maudit, de ce qui est juste et de ce qui est vrai, lorsque les dieux combattent avec les armées, le déferlement va jusqu'au génocide."<br /> Edgar Morin (Le paradigme perdu)
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M
J'entends ce mouvement de mauvaise humeur. Les travers d'hier n'excusent ou ne légitiment en rien les travers du jour. La compassion est mauvaise conseillère, sans doute. La politique a ses intérêts que Pierre de Coubertin ignore, sans doute. L'action est touours plus ou moins vaine, sans doute. L'Occident n'est pas exemplaire, sans doute encore. Mais la mauvaise humeur est sans portée dans le monde.
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F
Quel réveil insondable (...) on se préoccupe du Darfour ? Ca fait 40 ans que le mot Paix est inexistant là-bas. (c'est le début de leur indépendance). Les nordistes maîtres de l'Etat et les esclaves sudistes.<br /> Mais quel enjeu pourrait se cacher derrière un "flash Darfour" récent ? Pourquoi se presse t-on au portillon ? Se pourrait-il qu'on (mais qui est on ?) tente de faire un beau et tout nouveau dessin du Darfour (avec des couleurs pour mieux voir : en bleu l'Egypte, en jaune l'Arabie saoudite et en rouge le Soudan) ? <br /> Qui veut le fief et pourquoi ? <br /> Boycotter les JO ne servirait à rien ou alors à défier l'idée que s'en faisait De Coubertin : sociabilisation et moralité.<br /> Quant aux génocides passés et présents : personne n'a été capable de les empêcher mais on en parle avec une compassion qui me retourne les tripes.
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A
Le défi qui consiste à faire pression sur la Chine n'est pas mince... Pourtant, l'idée lancée de boycotter les JO de Pékin me semble bonne.
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