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Marc Villemain
18 mars 2025

Cinéma : Je le jure, de Samuel Theis

 

Parachevant la « trilogie mosellane » ouverte avec Party Girl et Petite nature, dont chaque cinéphile aura pu louer la grande sensibilité, le nouveau long-métrage de Samuel Theis, en prenant prétexte d’une convocation pour un jury d’assises, se donne pour dessein de questionner le sens de la peine, et pour méthode de respecter avec le dernier scrupule les règles judiciaires qui ont cours (souci dont se dispensent la quasi-totalité des films de fiction, fussent-ils les plus admirables). En électrisant davantage encore son cinéma toujours à vif, et non content de n’affecter en rien son intensité dramatique, ce souci d’observation et de justesse n’en finit pas d’aiguiser le saisissement que l’on éprouve devant chaque film de Samuel.

 

Si Je le jure ébranle le spectateur autant qu’il interroge le sens commun, s’il trouble nos préjugés autant qu’il questionne les mobiles de nos propres jugements, il montre surtout, non sans rage ni délicatesse, combien il peut être ardu pour celle ou celui qui ignore tout de ses codes, de ses protocoles et de sa langue, de rencontrer l’institution judiciaire. Se confronter aux exigences de la justice, à son statut comme à son idéal, conduit fatalement à une confrontation avec soi-même. Or comment peut-il, lui, Fabio, ce taiseux, ce type un peu paumé, un peu largué, un peu alcoolo, participer à l’œuvre de justice et décider de la vie d’un autre ? Nul ne sort jamais indemne d’une telle responsabilité, qui peut aller jusqu’à ébranler l’idée que l’on se fait de soi. Aussi ne peut-on que saluer le travail des acteurs, qu’ils soient professionnels (Marina Foïs, Sophie Guillemin, Louise Bourgoin, Micha Lescot, Emmanuel Salinger, Claude Aufaure, Saada Bentaïeb) ou pas (Julien Ernwein, Marie Masala, Souleymane Cissé), d’avoir su épouser le parti pris éthique et esthétique du film, jusqu’à lui conférer sa belle fébrilité, et son souffle souvent bouleversant.

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