Cinéma : À son image, de Thierry de Peretti
Le sujet m’intéressait et la presse était plutôt dithyrambique, aussi je dois dire que je suis resté un tout petit peu sur ma faim devant cette adaptation, par Thierry de Peretti, du roman de Jérôme Ferrari. Le film dame évidemment le pion à maintes réalisations plus ordinaires, tant il a le mérite notamment d’esquiver les motifs les plus attendus de la geste romantico-contestataire et de déplacer la focale vers un personnage féminin (joué par Clara-Maria Laredo) complexe, taraudé à la fois par sa passion pour la photographie, son désir d’émancipation, son amour pour un combattant peu enclin à se détourner de la cause et son souci d’une juste raison dans l’histoire. Ce faisant, le film fait un pas de côté bienvenu en témoignant de manière singulière et parfois vibrante d’une période tragique de l’histoire politique corse.
Reste que l’ensemble m’est apparu un peu décousu, étrangement rythmé, parfois ambigu, et je m’explique mal (au-delà de la quête de sens de l’héroïne et de l’intérêt que Jérôme Ferrari a toujours porté à la photographie de guerre), le vague parallèle tendu avec le siège de Vukovar : est-ce à dire que l’État français, « colon » et « assassin », aurait quelque correspondance avec les agissements des paramilitaires serbes en Croatie ?). Par ailleurs, ce qui aurait pu me séduire, une sorte de ferveur adolescente, finit par moments par m’ennuyer ou m’agacer, et il est peu douteux selon moi que Peretti (qui joue également le rôle d’un curé pacificateur démuni et accablé) se soit fait plaisir en filmant, manière très Nouvelle Vague et au son de Salut à toi, des Bérus, quatre minutes d’une vague scène intime sans grande signification. Bon, pourquoi pas… Il en va de même de cette voix off dont on ne comprendra que sur le tard à qui elle appartient, et qui conforte l’impression vaguement édifiante que le film peut me laisser. Enfin il y a cette chute, cette tentative didactique, morale, d’ériger un pont vers la génération suivante ; l’intention est louable, les soldats ont mûri sans que les problématiques se soient nécessairement apaisées, mais la scène me paraît un peu rapide et maladroite.
Reste que je ne voudrais pas non plus bouder mon plaisir. « À son image » renferme de très belles scènes où frémissent un engagement, une émotion, une authenticité. Pas le grand film que j’espérais, certes, mais suffisamment sensible et inspiré pour renouveler un certain regard sur le « peuple corse ».